The Phoenician Scheme
6.1
The Phoenician Scheme

Film de Wes Anderson (2025)

Quand Wes Anderson imite Wes Anderson qui imite Wes Anderson

Deux ans après son précédent «Asteroïd City», Wes Anderson nous revient avec ce «Phoenician Scheme», qu'il a une nouvelle fois présenté dans le cadre de la compétition Cannoise, dont il est désormais devenu un habitué.


Une nouvelle production qui vient me confirmer que le cinéaste américain s'est enfermé dans une sorte de "formule" dont il ne semble plus vouloir sortir.

Une formule qui avait atteint son apogée avec son très bon «Grand Budapest Hotel», et qu'il semble depuis vouloir répéter à chacun de ses projets, si bien que l'on a par moments l'impression de revoir le même type de film, alors que chaque histoire qu'il nous dépeint est différente de la précédente.


Et ce sentiment de déjà-vu, je le retrouve dans cette comédie d'espionnage haute en couleurs (forcément), entre négociations commerciales perchées et tentatives d'assassinat en tous genres, et mettant au centre de son récit la réconciliation progressive entre un riche homme d'affaires magouilleur (interprété par le toujours impeccable Benicio Del Toro et son humour pince-sans-rire) et sa fille (interprétée par Mia Threapleton, la fille de Kate Winslet) devenue nonne, et qu'il a nommé seule héritière de sa fortune.


Tourné cette fois-ci dans les Studios Babelsberg en Allemagne, un nouveau film possédant à nouveau un rythme soutenu, où la parole ne s'arrête quasiment jamais, ne laissant que peu de respirations au récit, qui s'avère un peu ronronnant sur la durée.

Un nouveau film faisant un peu plus mouche au niveau de son humour, que ce soit au niveau de certaines séquences (comme cette négociation autour d'une partie de basket) ou de quelques réparties bien senties.

Un nouveau film pouvant à nouveau compter sur un casting 8 étoiles (dont je ne déroulerai pas toute la liste ici), même si certains d'entre eux se retrouvent à faire un caméo plus qu'autre chose.


Et tout cela à l'intérieur d'une mise en scène à nouveau réglée au millimètre près, où rien ne doit déer (même si, oh surprise, Anderson laisse sa caméra s'aventurer à quelques rares moments hors de son habituel cadre fixe, notamment lors de son duel final, y apportant une autre dynamique), et aux décors inspirés et somptueux, nous démontrant comme toujours que le réalisateur perfectionniste sait particulièrement soigner la plastique de ses films.


Il est juste dommage, encore une fois, que tout ce que je vois se dérouler à l'écran ne me procure finalement que très peu d'émotions, ne m'emporte pas. Et pour se rappeler durablement d'une œuvre, il faut que l'on se sente connecté à elle, d'une manière ou d'une autre. Ce qui n'est, à nouveau, pas le cas ici. L'impression persistante d'être devant un beau tableau, mais de rester extérieur face à celui-ci.


Voilà le problème principal des derniers films de Wes Anderson : cette zone de confort dans laquelle il s'est installé, sorte de redondance obsessionnelle et picturale (accompagnée d'une composition transparente de l'habitué (lui aussi) Alexandre Desplat).

Une redondance qui risque bien de créer de la lassitude auprès du public, qui finira par résumer son cinéma par ces mots : "c'est beau, mais c'est à peu près tout."


Oui, ça reste vraiment plaisant à regarder (le contraire m'aurait étonné), le casting fait plaisir à voir et certaines touches d'humour marchent comme il faut.

Oui, ce film est bien fait, mais j'ai déjà vu ce film auparavant.


Peut-être que la prochaine fois, prendre le risque de briser sa plastique pour y laisser rentrer un peu plus de cœur et d'inattendu ne fera sans doute pas de mal.


Faites vivre vos personnages avant votre cadre et soyez là où on ne vous attend pas forcément Mr. Anderson. Cela ne pourra vous faire que du bien, à vous comme à nous.

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le 29 mai 2025

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Raphoucinévore

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