San Ku Kai
5.9
San Ku Kai

Drama TV Asahi (1978)

Emeralida

Ayant découvert la série en VOST, son titre, la plupart des noms des planètes, ainsi que ceux de la plupart des personnages, mais aussi l'intégralité de la partition musicale ont été remplacés n'importe comment par n'importe quoi lors de sa diffusion en . Malgré tout, elle est devenue néanmoins mythique pour toute une génération d'enfants qui continue, à l'âge adulte, de surcoter le produit. Pourtant, San Ku Kaï reste certainement la pire copie de Star Wars de tous les temps. C'est même encore pire que le Starcrash de Luigi Cozzi qui, lui, s'imbriquait parfaitement dans une forme de délire semi-humoristique plutôt bienvenue pour l'époque. San Ku Kaï, malheureusement, se prend au sérieux de A à Z et s'étend sur 27 épisodes sans une once de budget et encore moins d'ingéniosité artistique.

En 1977, un véritable phénomène de société au budget plus que modeste s'étend aux quatre coins de la planète. À lui seul, Georges Lucas révolutionne l'industrie hollywoodienne et mixe à sa sauce l'esthétique samouraï d'Akira Kurosawa, l'heroic fantasy au parfum Tolkien, la mythologie du western ainsi que la SF pulp dont le cinéaste s'est abreuvé durant son enfance. Au bord du dépôt de bilan, les analystes financiers de la Toei, venus chercher l'inspiration en territoire yankee, restent subjugués par le triomphe commercial du premier Star Wars. Car, si on excepte la maestria de Lucas, le film reste une sorte de copie conforme à la SF fauchée nipponne. Venant juste d'initier la mode des séries sentai, initiée par Goranger, produite entre 1975 et 1977, la Toei va s'approprier la licence de Lucas sans lui reverser un seul centime de droits d'auteur.

La Fox ne s'étant absolument pas préparée au colossal succès de Star Wars, le film ne fut pas distribué au Japon avant le second semestre 1978. Les dirigeants de la Toei profitent alors de cette aubaine pour écrire, produire, réaliser et distribuer à la va-vite (6 mois) un long-métrage SF titré Uchu Kara No Messeji (littéralement "Un Message Venu De L'Espace" qui se verra traduit en français par Les Évadés De L'Espace). Pour pallier aux déficiences financières dont risque de souffrir le film, la Toei confie la réalisation au célèbre Kinji Fukasaku qui a littéralement inventé les débordements de violence stylisée de par une caméra quasi-indomptable qui bouleversa à jamais les règles de mise en scène du polar nippon (Le Cimetière De La Morale - 1975, Violent Panic : The Big Crash - 1976…). Avec Les Évadés De L'Espace, Fukasaku pose les bases de l'univers de San Ku Kaï sans toutefois être une véritable introduction à la série. Cette dernière affiche seulement l'un des acteurs du space opéra de Fukasaku, Hiroyuki Sanada, dont le prénom Shiro se métamorphose en Hayato pour sa fausse suite. Adolescent de 17 ans et membre du Japan Action Club, Sanada est un artiste martial débutant qui ret ici une exécrable équipe de comédiens.

Dans cette série originellement titrée Uchu Kara No Messeji : Ginga Teisen (que l'on peut traduire par "Un Message Venu De L'Espace : La Guerre Intergalactique"), Luke Skywalker se métamorphose en Hayato alias Le Fantôme, Han Solo en Ryū alias Météore, Chewbacca en Barū (Siman en VF), R2-D2 en Tonto (Sidéro en VF), etc. etc. Bref, ce sont de ridicules copies d'héroïques gentils qui vont devoir combattre des méchants ultra théâtralisés et vulgairement pompés sur les personnages de Darth Vader ou autre Wilhuff Tarkin.

Pour une simple raison économique, chaque scène se voit tournée une seule et unique fois et conserve ainsi toutes les erreurs techniques : le pied d'un assistant poussant un rocher en mousse sur la tête d'un méchant, le même rocher rebondir comme un ballon au fond du plan, un figurant mort de rire, un trampoline, la cape du ridicule méchant de service se coinçant dans le casque de son sous-chef de frère ou encore le personnage de Barü tentant désespérément de vider l'eau s'étant introduite par les orifices de son masque pour ne pas périr noyé. Masque qui, par ailleurs, s'abime lors de cette scène en brunissant considérablement, sans être toutefois remplacé jusqu'à la fin de la série. Bref, pas un seul yen superflu ne semble avoir été dépensé pour conter les aventures de ces guerriers d'opérette.

Quant à la réalisation, elle atteint certainement ici le plus haut degré de dépouillement : zéro raccord, zéro fondu, zéro effet optique et zéro mouvement d'appareils puisque les combats spatiaux restent extraits du film original de Fukasaku et projetés à l'infini selon les besoins de la série. Les incohérences scénaristiques sont également légions (la scène où Barü se souvient d'un évènement qui se déroulera 3 épisodes plus tard reste sacrément extraordinaire 😀), à l'exemple de l'opération à entrer dans un camp ennemi afin de dérober un plan qui permettra de pénétrer dans le même camp 🤣

Enfin, le jeu de l'INTÉGRALITÉ du casting atteint de toute évidence les limites de la sobriété en se bornant à trois expressions : la colère, la surprise et la vanité, toutes terriblement mal incarnées. Mais ce n'est pas tout, puisque les distributeurs français ont eu recours, en sus, aux plus mauvaises métamorphoses qu'ils puissent inventer avant sa diffusion sur les écrans télévisés français en septembre 1979.

En ce sens, exit la superbe musique de Shunsuke Kikuchi qui avait pourtant déjà fait ses preuves chez nous avec la B.O. de Goldorak. Ici, Huber Chonzu, à la tête de BRH (qui a distribué Goldorak, Candy et Albator à la fin des années 1970 en ) opte pour les chanteurs de variété Éric Charden et Didier Barbevilien afin de recomposer l'intégralité du score. Malgré toute l'horreur artistique de la démarche (générique disco à 2 balles où les paroles entonnent "dans l'espace, la guerre est sublime"), San Ku Kaï reste néanmoins, toujours et encore, au panthéon des monuments de la télévision française. Même si le terme San Ku Kaï n'existe pas dans sa version originale (où le vaisseau en question se nomme Riabe), la série reste une catastrophique et exécrable série Z ultra assumée. C'est sûrement ce dernier point qui l'a rendue aussi sympathique, il y a 46 ans, aux yeux des très jeunes spectateurs français. Mais aujourd'hui, très concrètement, cette malheureuse aventure ne vaut guère tripette. Même en VO.

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